Interview de Charlie Daniels
(décembre 2018) par Arnaud Choutet
AC : Beaucoup de compositeurs de musique classique (Bruckner, Haydn, Rachmaninoff, Tchaikovsky, Brahms, Mendelssohn ou Vivaldi) ont produit une œuvre complète dans la tonalité de mi. C'est encore plus commun dans le blues. Mais les bluesmen choisissent souvent des paroles sur les thèmes de l'abandon, du rejet sexuel, des désirs charnels, de la vengeance... Quels étaient les différents thèmes que vous vouliez aborder sur cet album, Beau Weelies?
CD : Je n'avais pas d'intentions particulières. Juste écrire des paroles directes, faciles à comprendre, chantées sur des morceaux solides et gorgées de feeling. Si ces chansons ont été écrites en accord de mi, c'est qu'au fur et à mesure que je composais, elles ont eu tendance à prendre toutes cette direction, autant dans la tonalité que dans l'émotion.
AC : « Geechi Ya Ya » et surtout « Hell All Have Some » ont des superbes riffs de slide guitare dans la tradition du rock sudiste. Vous utilisez quelques termes français dans les paroles : « beau temps rouler », « c'est la vie », « c'est pas mal »... Est-ce inspiré par le swamp rock de Louisiane ?
CD : La chanson est inspirée par la musique, la culture et les gens du sud de la Louisiane. Le patois cajun m'est venu à l'esprit pendant l'écriture de cette chanson.
AC : « Louisiana Blues » est aussi une chanson formidable mais a une différente atmosphère, très nostalgique, dans la tradition de Toy Caldwell. Êtes-vous d'accord ?
CD : C'est davantage l'évocation d'une ballade dans le style Dixieland. Je m'imaginais Louis Armstrong chanter cela.
AC : Espérez-vous que l'une de ces 10 nouvelles chansons deviendra un hit ? Est ce que l'une ou l'autre sera particulièrement mise en avant ?
CD : Bien entendu on aimerait beaucoup avoir un hit avec cet album. Mais comme nous sommes à la période de Noël, les play lists sont bloquées, ce sont les chansons de Noël qui sont jouées sur les radios américaines. Ce ne sera qu'au début de l'année prochaine que nous saurons quelle chanson émergera.
AC : Pourquoi le nom du Charlie Daniels Band a-t-il disparu au fil des ans (Charlie Hayward, par exemple joue avec vous depuis longtemps) ?
CD : Le nom de Charlie Daniels Band n'a en rien disparu. Nous avons joué 108 concerts cette année et comptons en faire autant en 2019. Nous avons une équipe permanente de musiciens, roadies et administratifs, et n'avons certainement pas l'intention de nous séparer. Le Beau Weelies est juste un projet parallèle amusant que je voulais faire depuis longtemps, mais n'a rien à voir avec l'existence du CDB.
AC : Sur votre site il est dit que le cowboy dessiné sur la couverture de l'album Saddle Tramp est un amalgame des visages des musiciens. Est-ce vrai ?
CD : Oui, du groupe et des roadies en 1976.
AC : Vous avez une imagination fertile, vous êtes co-auteur de toutes les pistes du disque, inventant de nouveaux personnages sur ces nouvelles chansons. Vous avez aussi écrit des histoires dans des livres. Avez-vous été tenté de développer toute une histoire sur un album entier ? En faire un film ?
CD : Je n'ai pas de projet de film particulièrement, mais un album thématique est tout à fait possible.
AC : Sur « How You Roll » vous évoquez un « redneck », un « country boy ». Est ce que les caractéristiques de ce personnage a évolué aux États-Unis au fil des ans ? Pensez-vous que son attachement aux racines sudistes a changé ?
CD : Pour moi un redneck est juste le type de travailleur auprès duquel j'ai été élevé et dont j'apprécie la compagnie : juste honnête, dur au labeur, patriote, qui n'a pas peur de dire tout haut ce qu'il pense, et défend ses points de vue.
AC : Vous avez joué quelques concerts en France en 1970, accompagnant Leonard Cohen, puis vous avez joué en tête d'affiche le 12 avril 1996 au Billy Bop Saloon de Disneyland à Paris. Quels souvenirs gardez vous de ces expériences ? Pouvons-nous espérer votre retour dans le futur ?
CD : Je m'en souviens bien et j'aimerais revenir en France un de ces jours...
AC : Votre voix sonne inaltérée, toujours aussi jeune. Vous passez votre temps libre à aider des associations caritatives. Vous semblez vivre plusieurs vies simultanément. Quel est le secret de votre énergie ?
CD : Ma force, mon énergie, mon enthousiasme et ma capacité à créer et me produire autant sur scène sont des bénédictions de Dieu. Je suis un chrétien, un disciple de Jésus Christ et mes priorités sont Dieu, la famille, le pays et le travail. J'essaye de garder mes priorités en ordre et laisse le reste à Dieu tout puissant.
AC : Vous vous intéressez à la politique et partagez souvent vos opinions, qui tendent vers des idées conservatrices et patriotiques. Est-ce que vous craignez parfois les idées extrêmes, quelque soient leurs bords, qui divisent le peuple ?
CD : Je n'ai pas l'intention de diviser, aliéner ou offenser, mais seulement d'utiliser mon droit de citoyen américain pour exprimer mes sentiments les plus profonds. Je ne m'attends pas à ce que l'on partage mes opinions.
AC : Vous êtes une figure tutélaire du rock sudiste depuis bientôt cinquante ans. Parmi la jeune génération, voyez-vous des héritiers ?
CD : Je ne suis pas de près la nouvelle scène, je ne suis pas à jour des dernières nouveautés mais je suis certain qu'il y a des jeunes influencés par Duane Allman et Ronnie Van Zant capables de poursuivre cette tradition.
AC : Qu'est-ce pour vous le rock sudiste ?
CD : Un mélange de blues, jazz, gospel, country, bluegrass, interprété par des gars et des filles de différentes parties du pays, mais partageant tous en commun le même environnement économique, religieux et social, et exposés au même type de musique : une rivière avec beaucoup d'affluents mais qui coulent dans la même direction.
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